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Rapports du M�diateur du Vanuatu

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L'expulsion de Marc Neil-Jones directeur du trading post [2001] VUOMF 2; 2001.08 (31 October 2001)

RÉPUBLIQUE DE VANUATU
BUREAU DU MÉDIATEUR


SPR 081

PORT-VILA

VANUATU


RAPPORT PUBLIC
SUR
L'EXPULSION DE MARC NEIL-JONES,
DIRECTEUR DU TRADING POST


31.10.2001
1106/2001/08


RAPPORT PUBLIC
SUR
L'EXPULSION DE VANUATU
DE MARC NEIL-JONES
DIRECTEUR DU TRADING POST


TABLE DES MATIÈRES


RÉSUMÉ.................................................................................................................3
1. COMPÉTENCE..................................................................................................4
2. OBJET, ÉTENDUE DE L'ENQUÊTE ET MÉTHODES ADOPTÉES ............4
3. LOIS ET RÈGLES PERTINENTS ....................................................................5
4. EXPOSÉ DES FAITS.........................................................................................5
5. RÉPONSES.......................................................................................................13
6. CONSTATS......................................................................................................14
7. RECOMMANDATIONS.................................................................................19
8. ANNEXE.........................................................................................................20


RÉSUMÉ


Le médiateur enquête sur l’expulsion de Vanuatu le 19 janvier 2001 de Marc-Neil Jones (M. Jones), directeur du journal Trading Post. L'enquête émane de la propre initiative du médiateur car l'affaire soulève d'importantes questions d'infractions à l'impartialité de la procédure et atteintes aux droits et libertés constitutionnels et civils par le gouvernement. Les dirigeants du gouvernement pourraient avoir enfreint le Code de conduite des hautes autorités. Cependant l'enquête ne couvre que la détention et l'expulsion de M.Jones.


Résumons les faits. Le 19 janvier 2001 à 5 heures et demie, Lesley Garae, agent principal de l'immigration, et d'autres policiers ont réveillé M. Jones chez lui à Melemaat, village situé en dehors de Port-Vila. L’API informe M. Jones qu'il est en état d'arrestation et qu'il serait immédiatement embarqué pour le vol de 7 heures pour Brisbane. L'API lui a présenté les documents ordonnant sa détention et son expulsion signés par Barnabas Tabi, ministre de I'Intérieur, sur demande du Premier ministre Barak Sopé (1)


M. Jones est conduit à l'aéroport sans être autorisé à prendre du linge, des médicaments ou de l'argent avec lui. A l'aéroport, M. Michael Hill, Haut Commandant britannique et John Malcolm, avocat de M. Jones ont essayé d'intervenir mais ils ont été tous les deux informés par l'API que c'était un ordre du gouvernement et qu'il ne faisait que suivre. M. Jones a ensuite été forcé à monter dans I'avion, par la Police et l'API.


Plus tard dans la matinée, son avocat a obtenu une ordonnance intérimaire ex-parte de la Cour suprême. La cour a ordonné au gouvernement de délivrer ou prolonger un permit autorisant M. Jones à retourner à Vanuatu, sans affecter ses droits d'y vivre et travailler. En apprenant l'ordonnance du Tribunal, l’API a informé ses agents de permettre A M. Jones de revenir. M. Jones est retourné à Vanuatu le dimanche 21 janvier 2001.


Constats


Le médiateur a constaté que


1. L'arrêté d'expulsion pris par le ministre de I'Intérieur, Barnabas Tabi, est illégal et contraire aux articles 3, 17 et 25 du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'immigration (CAP 66).


2. Le ministre de l'Intérieur et l'API, en détenant et expulsant Marc-Neil Jones sans préavis, ont nié ses droits et libertés selon l'article 5 de la Constitution.


3. Les assertions de l'API selon lesquelles il n'exécute que des ordres sont contraires à ses devoirs et obligations d'API selon l'article 3(3) du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l’immigration (CAP 66).


(1)Le gouvernement de Barak Sopé a été renversé par une motion de censure débattue par le Parlement le vendredi 13 avril 2001. Cependant dans le présent rapport, toute référence au gouvernement se porte sur le gouvernement du Premier ministre Barak Sopé.


Recommandations


Le médiateur recommande


1. Au ministre de I'Intérieur de bien connaître l'étendue de sa compétence et ses pouvoirs selon le R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'immigration (CAP 66), et ne pas signer un arrêté d'expulsion visiblement illégal.
2. Au ministre de l'Intérieur de consulter l'Attorney général qui est le conseiller juridique du gouvernement avant de signer un arrêté d'expulsion.
3. A l'Attorney général ou son représentant de ne pas céder aux pressions politiques en rédigeant des arrêtés d'expulsion illégaux à la demande des politiciens.
4. A l'API de se conformer à la législation et s'assurer que tout arrêté d'expulsion est pris légalement, en tenant compte du temps de préavis et d'appel.
5. De modifier l'article 3 du R.C. relatif à l'immigration (CAP 66) pour préciser que l’API a les devoirs et obligations de faire appliquer les lois nationales, et non d'obéir à tout organe dont il relève.
6. Au Premier ministre et au ministre de l'Intérieur de bien se familiariser avec les documents internationaux liant Vanuatu, en particulier ceux relatifs aux droits de l'homme, afin d'éviter à I'avenir tout embarras I'Etat et aux citoyens de Vanuatu.


1 COMPÉTENCE


1.1 La Constitution, la loi relative à la fonction de médiateur et la Loi No.2 de 1398 relative au Code de Conduite des hautes autorités permettent au médiateur d'enquêter sur le comportement du gouvernement, des organismes administratifs connexes et des dirigeants. Cela comprend le service de l'Immigration et d'autres institutions publiques impliquées dans 1'expulsion de Marc-Neil Jones (M. Jones) conformément aux dispositions du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'immigration (CAP 66) et de la Constitution.


2. OBJET, ÉTENDUE DE L'ENQUÊTE ET MÉTHODES ADOPTÉES


2.1 Le présent rapport a pour objet de fournir un document de travail confidentiel aux plaignants afin qu'ils aient une chance d'y répondre, et si possible de résoudre les questions pendantes avant la publication du rapport public. Suite à l'émission du document de travail, le gouvernement n'a fait aucun effort pour résoudre les questions soulevées. Le médiateur a donc publié le présent rapport public.


2.2 L'enquête permet d'établir les faits sur l’expulsion de M. Jones, directeur du Trading Post, 1e 19 janvier 2001. Elle établira également si l'arrêté pris par le ministre de I'Intérieur (et de l'Immigration) était conforme aux lois nationales et si l'officier principal de l'Immigration et les policiers l'accompagnant ont agi selon la loi lorsqu'ils ont exécuté
l'ordre d'expulsion. Alors que beaucoup d'affaires soulèvent la violation du Code de conduite des hautes autorités, le présent rapport se concentre uniquement sur la prévarication et la violation de la loi par le ministre de I'Intérieur.


2.3 Le bureau recueillit des informations et documents par demandes informelles, sommations, lettres, interviews et recherches.


3. LOIS ET RÈGLES PERTINENTS


Le texte entier de toutes les lois pertinentes est joint à l'Annexe P


LA CONSTITUTION DE LA RÉPUBLIQUE DE VANUATU
LOI NO. 27 DE 1998 RELATIVE A LA FONCTION DE MÉDIATEUR LE RÈGLEMENT CONJOINT NO. 18 DE 1971 RÈGLEMENTANT ET CONTROLANT L'IMMIGRATION A VANUATU (CAP 66)
DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME


4. EXPOSÉ DES FAITS


La Directive du Bureau du Premier ministre


4.1 Le 12 janvier 2001, le Premier ministre Barak Sopé écrit à Barnabas Tabi, ministre de I'Intérieur, lui ordonnant l'expulsion immédiate de M.Jones. Selon M. Sopé, alors Premier ministre, M. Jones "portait atteinte à l'image du pays par ses reportages erronés ", (Voir Annexe A).


4.2 Le 18 janvier 2001, M. Jones, directeur du Trading Post, informe Dinh Van Than (2), par téléphone que le journal va publier un article sur les tentatives du gouvernement de convaincre la Banque de Réserve d'émettre des obligations d'état valant 50 millions $US à M. Amendra Nath Ghosh, consul honoraire de Vanuatu en Thaïlande.


La délégation du bureau de l'Agent principal de l'Immigration


4.3 Le 18 janvier 2001, vers 18h15, une délégation composée du commandant de la police, Peter Bong, sous commandant de la police, Paul Willie Reuben et des directeurs de cabinet, David Esrom (PRG), ionel Kalwat (Affaires foncières) et Clifford Bice (Infrastructure) ont rencontré.l'API, Lesley Garae.


4.4 La rencontre a pour objet d'ordonner à l'API d'exécuter I'ordre de détention et d'expulsion signé ans la matinée, par le ministre de I'Intérieur, M. Barnabas Tabi, (Voir Annexe B et C).


L'Exécution des Arrêtés de détention et d'expulsion


4.5 Le 19 janvier 2001, vers 5h30, Jenny Siméon, concubine de M. Jones, a été réveillée dans leur résidence, près du village de Melemaat, au


(2) Un riche homme d'affaires et chef de la communauté vietnamienne à Vanuatu.


Nord de Port-Vila, par le bruit des voitures entrant dans la propriété. Par la fenêtre, elle a vu l'API accompagné des policiers.


4.6 Jenny Siméon a réveillé et informé M. Jones que la police désirait le voir. En ouvrant la porte, l'API lui a déclaré qu'il était en état d'arrestation et qu'il serait immédiatement conduit à l'aéroport et expulsé. M. Jones a demandé à voir les papiers. On lui a montré les copies des ordres de détention et d'expulsion.


4.7 M. Jones a demandé à l'API de le conduire au commissariat de police pour lui permettre de consulter son avocat. L'API a refusé en lui répondant qu'il n'y a pas de temps car le vol pour Brisbane est prévu à 7h00.


4.8 M. Jones a déclaré à l'API que son action est illégale. Il affirme que l'API l'a réprimandé pour avoir publié sur le Premier ministre des articles qui l'expose à l'expulsion. L'API a déclaré qu'il ne faisait que suivre les instructions.


4.9 Jenny Siméon a ensuite informé l'API que M. Jones est un diabétique insulinodépendant et qu'il doit prendre ses médicaments. M. Jones prétend que les policiers ne l’ont pas autorisé à prendre son insuline, dans le réfrigérateur, mais lui ont répondu de s'en acheter en Australie.


4.10 M. Jones a déclaré à l'API qu'il a un passeport britannique et qu'il a payé une caution à l'immigration pour être rapatrié en Angleterre en cas d'expulsion. Selon M. Jones, l'API n'a rien pris en considération et continuait de répéter qu'il suivait les instructions.


4.11 Ensuite, Jones est sorti de la maison et embarqué dans l'un des véhicules de police il prétend n'avoir emporté qu'un petit stylo injecteur et 5.000 VT. On ne l'a pas autorisé à prendre du linge ou des médicaments.


4.12 Sur le moment, M. Jones a demandé à Jenny Siméon de contacter Gene Wong, son associé et avocat. Celle-ci a demandé aux policiers qui étaient dans la maison si elle pouvait utiliser le téléphone. Selon Jenny, ils l’ont intimidée et lui ont demandé pourquoi elle voulait utiliser le téléphone. Elle affirme avoir eu trop peur d'eux pour téléphoner.


Arrivé à l'aéroport international de Bauerfield


4.13 A I'aérogare Bauerfield, dans la zone de départ, M. Jones a couru vers la zone de départ en criant qu'il était le directeur du journal Trading Post et que le gouvernement 1'expulsait car il n'aime pas les articles qu'il publiait. M. Jones a déclaré que cette action est une violation des droits de l'homme.


4.14 On prétend que des gens tentaient d'aider M. Jones mais les agents de sécurité de l'aéroport ont empêchés toute communication téléphonique et coupé les lignes.


4.15 L'API et les policiers ont conduit M. Jones dans une salle dans la zone d'immigration. Après d'autres altercations avec l'API, M. Jones déclare avoir abandonné la partie et a pleuré. Il a demandé à l'API pourquoi il faisait cela, celui-ci lui a répondu qu'il ne faisait que suivre les instructions.


4.16 John Malcolm, avocat de M. Jones, entre dans la salle de l'immigration et informe l'API que l'ordre d'expulsion est contraire à la loi et qu'il lui faut du temps pour obtenir une injonction du tribunal pour empêcher l'expulsion. L'API a maintenu que M. Jones doit partir tout de suite et que John Malcolm doit s'en aller.


4.17 Jenny Siméon est entrée au bureau de l'immigration et a déclaré à l'API que M. Jones a besoin de prendre ses médicaments contre le diabète. L'API lui a répondu qu'elle n'avait aucun droit d'être là.


4.18 Selon M. Jones, Michael Hill, le Haut- commissaire britannique, est entré au bureau et a demandé à parler au ministre de I'Intérieur, Barnabas Tabi. L'API a déclaré qu'il ignorait son numéro téléphonique. Le Haut-commissaire a déclaré à l'API que son acte est une infraction aux droits de l'homme mais l'API a répondu qu'il ne faisait que de suivre les instructions. Le Haut-commissaire britannique a déclaré que cela risquerait de provoquer un important incident diplomatique.


Embarquement dans l'avion


4.19 L'API déclare à M. Jones qu'il doit monter dans l'avion. M. Jones déclare avoir refusé en déclarant que "je ne bougerais pas car j'ai aussi mes droits que vous ne respectez pas. Cela n’a rien avoir avec les instructions. C'est des conneries et vous serez obligés de me porter lorsque je vais me débattre et hurler car je ne partirai pas". Le Haut-commissaire a conseillé à M. Jones de partir calmement.


4.20 En montant dans l'avion, M. Jones déclare avoir crié la foule "mes droits ont été ignorés. Je suis expulsé sans linge, sans bien, sans argent". Il déclare également avoir été en ce moment maltraité par les agents de sécurité


4.21 A son arrivée à Brisbane, le Haut-commissariat britannique prend en charge Marc Neil-Jones quant à l'hébergement, aux repas, aux appels téléphoniques et au linge.


4.22 Au même moment, John Malcolm, avocat de M. Jones, écrit au ministre de I'Intérieur, Barnabas Tabi d'annuler les ordres pris contre son client, mais en vain, (Voir Annexe D).


4.23 Dans la matinée, M. Malcolm obtient une ordonnance intérimaire ex parte signée par le président de la Cour Suprême par intérim, M. V. Lunabek. C'est une demande d'autorisation au Tribunal pour les ordonnances d'interdiction (3), de mandamus (4) et autres ordonnances. Cette ordonnance intérimaire cite le nom de 1'Attorney général, Ham Lison Bulu, et de l'API, M. Lesley Garae, respectivement 1er et 2e défenseur, (Voir Annexe E)


4.24Le Tribunal ordonne au gouvernement de délivrer ou de prolonger un permis autorisant M. Jones à entrer, résider et travailler à Vanuatu. Il a interdit au gouvernement de porter atteinte aux droits et privilèges de M. Jones de vivre et travailler à Vanuatu. II a également ordonné au gouvernement de le laisser entrer et sortir du pays à sa guise et d'annuler toute ordonnance de détention et d'expulsion prise contre la personne de M. Jones selon le R.C. No. 18 de 1971 relatif a l'immigration.


4.25 En apprenant l'injonction de la Cour et la confirmation du retour de M.Jones à Vanuatu par le vol du dimanche 21 janvier 2001, l'API a autorisé ses agents de l'Immigration de laisser M. Jones rentrer à Vanuatu.


4.26 Le 21 janvier 2001, M. Jones retourne à Vanuatu et est accueilli par une foule de fidèles dont des agents de l'immigration. M. Jones déclare avoir été informé par M. Maxwell Cain, directeur d'Air Vanuatu de Brisbane, que des pressions "d'en haut" tentent de l'empêcher de prendre l'avion à Brisbane. On lui a conseillé de prendre le Qantas pour éviter des problèmes.


4.27 Selon M. Jones cela a été confirmé plus tard par Jean Paul Virelala, directeur général d'Air Vanuatu. M. Virelala aurait affirmé qu'une personne très haut placée au gouvernement aurait tenté de l'empêcher de prendre l'avion à Brisbane.


4.28 Le lundi 22 janvier 2001, M. Jones dépose au bureau du médiateur une plainte officielle contre les agissements de M. Barnabas Tabi, ministre de l'Immigration et l'API, M. Lesley Garae.


(3)Une ordonnance d'interdiction est une injonction du Tribunal pour empêcher un tribunal de dépasser sa compétence, ou d'enfeindre les principes de la justice naturelle, et contrôler un ministre dans 1'exercice de ses fonctions quasi-judiciaires.
(4)Une ordonnance de mandamus sert à imposer 1'exercice des fonctions publiques. Dans ce cas, il appartient au ministre de se conformer au R.C. N° 18 de 1971 relatif a 1'imnugration.


4.29 Le même jour, le bureau du médiateur signifie un avis à témoigner (5) à M. Barnabas Tabi, ministre de I'Intérieur et à l'API, M. Lesley Garae conformément à l'article 62 (3) de la Constitution et l'article 22 de la Loi No. 27 de 1998 relative à la fonction de médiateur. Ces avis les obligent par la loi de venir à son bureau le 23 janvier 2001 justifier l'expulsion de M. Jones, (voir Annexes F et G).


4.30 Le 22 janvier 2001 après-midi, Jeannette Bolenga, Directrice générale par intérim du ministère de l'Intérieur, téléphone au bureau du médiateur pour repousser la date du rendez-vous et l'informer que leur bureau le contacterait pour fixer une nouvelle date.


4.31 Le 23 janvier 2001, M. Ham Lison Bulu, Attorney général téléphone au bureau du médiateur pour lui indiquer que l'expulsion de M. Jones et l'ordre intérimaire ex parte deviennent l'affaire du Tribunal. Il déclare que toute personne intéressée par l'affaire dont le bureau du médiateur doit arrêter toute enquête jusqu'à la décision du Tribunal. Toute enquête relative à cette affaire pourra être un outrage à cette décision. II confirmera cela par l’écrit, (Voir Annexe H).


4.32 Le bureau du médiateur a répondu aux directives de l'Attorney général que la compétence du médiateur ne doit être sujette, dans l'exercice de ses fonctions, à aucune directive de tout organe quelconque, y compris l'Attorney général. L'attorney général n'a aucun fondement juridique pour donner des directives au bureau du médiateur. Le bureau convoque à nouveau le ministre de l'Intérieur conformément à la loi, (Voir Annexe I).


4.33 Le 23 janvier 2001, l'API se rend au bureau comme prévu. Il affirme avoir reçu le 18 janvier 2001 à son bureau une délégation du bureau du Premier ministre composée des Directeurs de cabinet, M. David Esrom du PRG, M. Clifford Bice des Services publics et de l'infrastructure et M. Lionel Kalwat des Affaires foncières, du Commandant de police, M. Peter Bong, et du Sous Commandant M. Paul Willie Reuben. Ils ont remis à l'API les copies des ordres de détention et d'expulsion en lui demandant d'exécuter les ordres le lendemain.


4.34 Interrogé sur les motifs d'un arrêté d'expulsion qui semble illégal, l'API répond qu'il n'avait pas de temps d'examiner la loi relative à l'immigration. On lui a ordonné de mettre M. Jones dans l'avion tôt le matin suivant.


(5) Selon la Constitution et la Ioi N°27 de 1998 relative à la fonction de médiateur, un avis à témoigner est fondamentalement la même chose qu'une sommation à comparaître. Quiconque manque de se présenter sur demande au tribunal commet une infraction qui l'expose sur condamnation à une amende n'excédant pas 100 000 VT.


4.35 L'API est en outre interrogé sur sa charge d'Agent Principal de l'Immigration. Lorsqu'on lui demande s'il ne lui appartiendrait pas de bien s'informer sur les lois qui régissent son bureau et de bien connaître les procédures appropriées à suivre lors de l'exécution d'un arrêté d'expulsion, il répond qu'il n’avait aucun choix et qu'il ne faisait qu'exécuter les ordres et instructions reçus. L'API déclare qu'en tant que policier, il doit obéir à l'ordre donné par le Commandant de Police, M. Peter Bong, pour éviter toute mesure disciplinaire pour infraction à la discipline.


4.36 Interrogé si l'API savait si l'Attorney général a approuvé et rédigé les ordres, il pense que l'Attorney général a du en être informé avant qu’il ne lui soient remis.


4.37 Interrogé sur son devoir de policier et celui d'Agent Principal de l'immigration, car il semble qu'il y a conflit entre les deux devoirs, il précise qu'à Vanuatu, les deux postes entretiennent de la confusion. L'API est appuyé par la police dans ses actions de chef de l'Immigration. Il ajoute qu'il est d'abord un policier et qu'il doit obéir aux ordres de son commandant, le Commandant de Police.


4.38 Lorsqu'on lui demande s'il a empêché M. Jones de prendre ses médicaments contre le diabète, il répond qu'il ne savait pas si M. Jones était vraiment diabétique. Le matin ou il est allé chez M. Jones, celui-ci à ouvert le réfrigérateur pour prendre ses médicaments mais il était si en colère qu'il n'a rien pris. Il affirme qu'il ne l'a pas empêché de prendre ses médicaments.


4.39 Lorsqu'on lui demande s'il a empêché M. Jones d'appeler de chez lui son avocat, l'API répond qu'il n'y avait pas de temps pour laisser M. Jones téléphoner. Il déclare ensuite que ni ses agents, ni lui-même n’ont empêché Jenny Siméon de téléphoner à l'avocat.


4.40 A l'aéroport, lorsque l'avocat, John Malcolm, a tenté d'aider M. Jones, I'AP1 lui a indiqué qu'il était en zone interdite, qu'il n’avait rien à y faire et qu'il n’avait aucune pièce d'identification pour y rester. L'API lui a expliqué que si une personne entre en zone réservée à l'immigration sans autorisation ni identification, l'API doit lui demander de sortir. Ici, l'API était à mi-chemin dans 1'execution de ses ordres et ne veut aucun obstacle quelconque. John Malcolm a fourni une déclaration ci-jointe à l'Annexe J).


4.41 Selon l'API, le Haut-commissaire britannique était autorisé à voir M. Jones parce qu'il était muni d'une carte d'identité lui permettant d'entrer en zone réservée. Il déclare que M. Hill s'en était pris à lui et avait tenté d'inciter M. Jones a s'emporter ("de plus, il ne fait que rendre Marc-Neil Jones plus furieux") et que le Haut-commissaire britannique est un diplomate, représentant de son gouvernement. Il devait suivre les bonnes procédures diplomatiques et ne devrait pas s’en prendre à I'API et ni tenter de 1'empécher d'exécuter ses ordres. L'API déclare également qu'il a honte de voir un diplomate d'un pays agir de la sorte. 1l déclare que le Haut-commissaire britannique aurait du convaincre M. Jones à régler l'affaire par voie diplomatique au lieu de l'encourager à résister.


4.42 Le médiateur a tenté de vérifier l'information avec le Haut-commissaire britannique. Mais, M. Hill déclare par téléphone le 29 janvier 2001 au bureau du médiateur qu'il s'abstient de toute déclaration qui pourrait être interprétée par le gouvernement comme une ingérence politique. Il déclare qu'i1 consultera ses supérieurs à Londres avant toute affirmation auprès du médiateur. (La réponse de M. Hill au document de Travail se trouve au titre 5 du présent rapport.)


4.43 Le 5 février, M. Hill envoie une lettre au bureau du médiateur se referant à la note diplomatique du janvier 2001 envoyé au service des Affaires étrangères. La note n'a pas été jointe, (Voir Annexe K).


4.44 Interrogé s'il a tenté d'intimider M. Jones ou Jenny Siméon, I'API répond qu'il était en pleine opération ou tout peut arriver. La sécurité des personnes impliquées et la bonne exécution des ordres sont importantes. A l'aéroport il devait contrôler M. Jones dans ses colères et pour qu'il ne s'échappe pas ou ne dérange personne.


4.45 Interrogé si le comportement de M. Jones est celui d'une personne normale dans ce genre de situation, expulsée illégalement avec très peu d'argent vers un pays étranger, I'API répond affirmativement. Il ajoute qu'à son avis M. Jones devrait pouvoir régler cela avec le gouvernement.


4.46 Interrogé s'il a maltraité et agressé Marc Neil Jones ou permis à d'autres policiers de le faire lorsque ce dernier était en arrestation, il a catégoriquement démenti tout acte de ce genre.


4.47 A la fin de l'interview, l'API souligne qu'il ne faisait qu'exécuter les ordres reçus. Il ne s'agit pas d'une opération personnelle. Il a simplement exécuté les ordres directs du gouvernement.


RÉPONSE DU MINISTRE DE L'INTÉRIEUR


4.48 Le 29 janvier 2001, le médiateur est informé par M. Tabi, ministre de l'Intérieur, qu'il ne répondra pas à la convocation pour lui donner des preuves car l'affaire est au Tribunal, (Voir Annexe L).


La Garde Mobile de Vanuatu


4.49 Interrogé le 30 janvier 2001, M. Peter Bong, commandant de Police, répond qu'il savait que M. Jones serait expulsé mais qu'il n'avait reçu aucun avis officiel avant jeudi 18 janvier 2001, lorsqu'il lui est demandé de se rendre au bureau de l'API.


4.50 Le commandant de Police a exprimé son inquiétude quant aux déclarations de M. Jones. Elles sont enfantines et incohérentes, en particulier celles contre la police. Il déclare avoir conseillé au ministre de l'Intérieur de déposer une plainte pénale contre M. Jones plutôt que de prendre un arrêté d'expulsion de quatorze jours. Cependant, il informe le ministre que la Police sera disponible si le ministre, le Premier ministre et l'Attorney général ont besoin d'aide.


4.51 Le commandant Bong confirme avoir reçu la demande de se rendre au bureau de l'API avec la délégation du bureau du Premier ministre, il a examiné les arrêtés et a demandé s'ils ont été approuvés par l'Attorney général. Les trois cadres politiques l'ont informé que le Cabinet juridique de I'Etat a été consulté. I1 demande quel avocat a été consulté, ils ont répondu avoir consulté M. Arthur Faerua. Le commandant estimait que les ordres ont été rédigés selon la loi et semblaient authentiques. Il a ensuite demandé à la délégation d'apporter les arrêtés à l'API et de lui demander s'il avait des instructions à donner à la Police.


4.52 Interrogé sur I'obéissance de l'API aux Corps de Police ou au ministre de I'Intérieur, le commandant Bong affirmait catégoriquement qu'une loi régit la fonction d'API et il ne prend pas d'arrêté direct de la Police. Il a souligné cela dans un communiqué du 24 janvier 2001, (Voir Annexe M).


4.53 Le 30 janvier 2001, MM. Arthur Coulton, Willie Vira et Capitaine Bongran Kalshem, trois des policiers engagés dans l'opération ont été interrogés séparément par le bureau du médiateur. Ils déclarent tous avoir agi sur les instructions de l'API. Ce dernier a mené seul l'arrestation et l'expulsion de M. Jones. Le capitaine Bongran a fourni une déclaration écrite sur l'engagement de la Police, (Voir Annexe N).


Les Directeurs de cabinet


4.54 Interrogé le 31 janvier 2001, M. David Esrom, Directeur de cabinet (PRG), affirme avoir fait partie de la délégation et qu'il a agi sur les ordres directs du Premier ministre.


4.55 Interrogé le 1er février 2001, M. Lionel Kalkat, Directeur de cabinet (Affaires foncières), affirme également avoir fait partie de la délégation et qu'il a agi sur les ordres directs du Premier ministre.


Le Premier ministre, Barak Sopé


4.56 Malgré les tentatives du médiateur du 31 janvier au 2 février pour obtenir son avis sur cette affaire, le Premier ministre n'a pas rappelé et n'a pris aucune disposition pour rencontrer le médiateur.


4.57 Le Premier ministre a donné sa position dans un communiqué du 19 janvier 2001 et dans une interview accordée à la radio et télévision le 24 janvier 2001. Le Premier ministre déclare que le style de reportage de M. Jones constitue "un danger pour le pays et le gouvernement ne permettra pas à un étranger comme lui de venir déstabiliser le pays", (Voir Annexe O).


4.58 Le Premier ministre répond au document de travail qu'un rapport absorberait inutilement les ressources publiques car l'application des recommandations serait irréaliste. Il recommande au médiateur de renoncer à l’enquête car il sait que M. Jones est son ami, pour éviter tout conflit d'intérêt, (Voir Annexe P).


5. RÉPONSES


5.1 Le Premier ministre, Barak Sopé, répond au document de travail. Il a averti le médiateur de ne pas publier le rapport public car il serait irréaliste. Il ajoute que le médiateur est un « ami personnel » de M. Jones. De ce fait il doit se renoncer à 1'enquête pour éviter de s'exposer à un conflit d'intérêt, (Voir Annexe P).


5.2 En réponse au document de travail, le commandant Bong répète que la Police et I'API ont agi de bonne foi estimant que l'arrêté à été pris par le ministre de I'Intérieur (sic). Il dit avoir été rassuré que I'arrêté a été rédigé par l'Attorney général en consultation avec le Premier ministre par intérim. Il ajoute que le commandant de Police ne peut influencer l'API ni lui ordonner d’une façon ou d'une autre d'exécuter l'arrêté en question, (Voir Annexe Q).


5.3 En réponse au document de travail, M. Hill déclare que le bureau du médiateur ne lui a pas demandé de "vérifier l'information". Il n'a pas été informé des remarques de I'API mais même si cela a été le cas, il n'aurait pas tenté de leur donner de l'importance par tout commentaire. De plus, il ajoute ne se souvient pas avoir dit franchement de ne pas vouloir fournir des renseignements au médiateur mais qu'il préférait consulter Londres avant toute déclaration qui pourrait être prise pour une ingérence politique. M. Hill estime la formule rédactionnelle donne l'impression d'une indifférence à la situation alors qu'il essayait de faire justement le contraire, (Voir Annexe R).


5.4 M. Garae, I'API. n'a pas répondu au document de travail.


5.5 TVL n'a pas répondu aux allégations sur la coupure des lignes téléphoniques.


5.6 Air Vanuatu n'a pas répondu aux allégations selon lesquelles Marc-Neil Jones a été empêché de prendre l'avion à Brisbane par une personne haut placée.


Règlement de l'expulsion de Marc Neil Jones


Puisque M. Jones a porté l'affaire d'expulsion au tribunal en vue d’une décision sur sa légalité, le médiateur a été informé par une lettre adressée à M. Jones par son avocat le 3 septembre 2001. Selon la lettre, le gouvernement accepte un règlement à l'amiable dont les modalités sont exposées à l'Annexe S. Le 25 octobre 2001, le médiateur obtient une ordonnance d'accord de la Cour Suprême précisant les modalités du règlement entre le gouvernement et Marc Neil Jones.


6. CONSTATS


1er Constat:

L'arrêté d'expulsion pris contre Marc-Neil Jones est illégal et contraire à l'article 17 (1 A) du R.C. No. 18 de 1971 règlementant et contrôlant I'lmmigration à Vanuatu (Cap 66)


6.1 Le médiateur constate que le ministre de I'lnterieur semble avoir enfreint la loi en ne respectant pas cet article car il n'a pas informé M. Jones quant à cet arrêté.


Le R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'Immigration a été modifié par le défunt père Walter Hadye Lini, alors ministre de l'Intérieur. Il a été modifié pour répondre à la logique de la justice naturelle et impartialité administrative et procédurière.


En résumé, selon l’article 17 (1 A) modifié, avant de prendre un arrêté, le ministre "doit aviser la personne par écrit " de son intention à cet égard et que celle-ci a quatorze jours, à compter de la date de l'avis, pour présenter son argumentation par écrit justifiant pourquoi elle ne devrait pas être expulsée.


2ème Constat:

Barnabas Tabi, ministre de l'Intérieur, aurait enfreint l'article 17 (1 B) du R.C. No. 18 de 197'1 relatif à l'Immigration


6.2 Selon l'article 17 (1 B) du R.C. No. 18 de 1971, le ministre doit tenir compte de I'argumentation avant de prendre un arrêté. Avant de le prendre le ministre Tabi n'a adressé aucun avis, ni donné une chance à Marc Neil Jones pour présenter son argumentation ce qui est un principe fondamental de toute mesure administrative. Le ministre a illégalement pris l'arrêté d'expulsion sans entendre toute argumentation de la personne visée par la mesure.


3eme Constat:

Barnabas Tabi, ministre de l’lntérieur, aurait enfreint l'article 17 (1 C) de la Loi No. 18 de 1971


6.3 Selon l'article 17 (1 C) de la Loi No. 18 de 1971, lorsqu'il prend un arrêté d'expulsion, le ministre rédiger sa décision en précisant les motifs de l'arrêté. Il doit adresser les copies et motifs de l'arrêté dans les 48 heures qui suivent la prise de l'arrêté à la personne et au Conseil des Investissements étrangers (CIE) si la personne a obtenu un permis auprès du CIE. Lorsque le ministre a remis une copie de 1'arrêté à M. Jones dans les 48 heures qui ont suivi sa prise, il n'a exposé par écrit aucune raison écrite comme prévu par la loi et il enfreint donc l'article 17 (1 C) du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'immigration.


Lorsque la loi exige des motifs d'une mesure administrative, toute décision prise sans présentation de motifs peut être considéré comme erroné et sujet à une révision juridique. La Cour Suprême de Vanuatu partage évidemment cette opinion car l'avocat John Malcolm a réussi à faire mettre en veilleuse les arrêtés.


4ème Constat:

Lesley Garae, API et Barnabas Tabi, ministre de l'Intérieur auraient enfreint l'article 21 (5) du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'Immigration en refusant le droit d'appel à Marc-Neil Jones conformément à cet article.


6.4 Selon l'article 21(5) du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'Immigration, quiconque fait l'objet d'un arrêté d'expulsion peut, dans les 14 jours qui suivent la réception de l'arrêté faire appel devant la Cour Suprême qui a compétence de recevoir des appels. Selon l'article 21 (8), le tribunal peut affirmer ou infirmer la décision du ministre ou prendre tout arrêté qu'il juge opportun. En prenant un arrêté de détention et d'expulsion à exécuter dans les 24 heures, le ministre et l'API n'ont évidemment pas permis à M. Jones d'exercer son droit légal de faire appel selon cet article. Ils ont donc enfreint leurs obligations prévues par la Loi.


LA CONSTITUTION


Commentaire


Le Titre 2 de la Constitution national décrit les droits et devoirs fondamentaux d'une personne. L'article 5 dote toute personne des droits fondamentaux et libertés sous réserve des restrictions que la loi peut imposer aux non citoyens. Ces droits sont soumis aux droits et


(6) Bien que la Constitution ne détaille pas ces restrictions, prenons en exemple le capital minimum qu'un étranger peut investir à Vanuatu ou bien on s'attend à ce que la personne quitte le pays une fois son visa touristique expire.


libertés d'autrui et à l'intérêt public légitime en matière de défense, de sécurité, d'ordre public, de bien-être et de santé.


5ème Constat:
Le ministre de I'Intérieur et l'agent principal de l'Immigration ont de toute évidence nié les droits constitutionnels de Marc-Neil Jones prévus à l'article 5 de la Constitution.


6.5 L'article 5 de la Constitution décrit les droits fondamentaux et libertés accordés à toute personne à Vanuatu sous réserve des restrictions que la loi peut imposer aux non citoyens à Vanuatu, une personne a droit à la liberté, sécurité de sa personne, protection de la loi, liberté d'expression et un traitement égal devant la loi ou mesure administrative. Comme mentionné ci-dessus, le ministre et l'API ont nié les droits constitutionnels de M. Jones, à la liberté et sécurité de sa personne, en le détenant par force et illégalement et en l'expulsant. La protection légale de M. Jones n'a pas été respectée car il n'a pas été autorisé de voir son avocat qui aurait pu obtenir une ordonnance intérimaire pour empêcher son expulsion. Il n'a pas eu droit à la liberté d'expression. II a été expulsé pour avoir publié des articles partiaux et la fuite des renseignements gouvernementaux.


Le ministre et l'API ont nié les droits de M. Jones quant au traitement égal dans les mesures administratives contrairement aux dispositions du R.C. relatif à l'Immigration qui lui donnent le droit d'être entendu et de recevoir les motifs de la décision prise. Ils ont refusé de lui permettre d'interjeter appel de la décision et de rester au pays en attendant la décision du Tribunal.


Le médiateur constate que le ministre et l'API ont enfreint la constitution, la loi suprême de Vanuatu.


6ème Constat:

L'explication de l'API montre qu'il ne faisait que suivre les ordres reçus comme policier. Il risquait des mesures disciplinaires s'il n'exécute pas l'ordre de son supérieur, Commandant Bong, contrairement à ses devoirs et obligations prévus aux articles 3 et 4 du R.C. relatif à l'Immigration.


6.6 M. Lesley Garae est un policier nommé API. De ce fait une loi, la R.C. relatif à l'immigration, régit sa fonction. Le fait de déclarer qu'il relève de l'autorité du Commandant Bong est contraire à ses devoirs d'API.


De plus, les arrêtés de détention et d'expulsion sont pris par le ministre de I'Intérieur dont relève l'API et non par le Commandant de police. L'API applique donc les instructions du ministre et non du commandant comme il le déclare.


7ème Constat:

En exécutant un arrêté clairement illégal, I'API viole ses devoirs et obligations prévus par le R.C. relatif à l'Immigration.


6.7 Tout fonctionnaire est tenu de savoir la loi qui régit sa fonction. Le fait pour I'API de déclarer qu'il n’avait pas de temps pour vérifier la légalité des arrêtés est de toute évidence inconcevable et ne fait que prouver I'illégalité des mesures.


LES DISPOSITIONS FONDAMENTALES DES DROITS DE L'HOMME


Commentaire


En tant que membre des Nations Unies, Vanuatu a des obligations internationales. Il a promis de promouvoir le respect universel et d'observer les droits de la personne et les libertés fondamentales(7). Bien que la déclaration universelle des droits de homme (adopté par 1'assemblée générale de I'ONU en 1948) n’ait pas d'obligation juridique sur les états membres, elle a une force morale indéniable, et constitue un guide pratique sur la conduite des états. Sa valeur repose sur son acceptation par un grand nombre d'états et est devenue un principe déclaratoire des droits de l'homme accepté par la communauté nternationale(8). Les articles ci-dessous n’ont aucun poids judiciaire à Vanuatu, mais ils sont, en général, acceptés selon les normes internationales des droits de l'homme.


LES DÉCLARATIONS UNIVERSELLES DES DROITS DE L'HOMME


8ème Constat:

Le ministre de I'Intérieur et I'API n’ont pas observé les obligations internationales de Vanuatu. Ils ont violé les droits de Marc-Neil Jones conformément à l'article 3.


6.8 Selon l'article 3, tout le monde a droit à la vie, liberté et sécurité de la personne. En emmenant de force et illégalement M. Jones de chez lui et en l'expulsant en Australie, le ministre et I'API ont violé ses droits à la liberté et sécurité.


9ème Constat:

Le ministre de I'Intérieur et I'API n’ont pas observé les obligations internationales de Vanuatu, ils ont violé les droits de Marc-Neil Jones conformément à l'article 7.


6.9 Selon l'article 7, tout le monde est égal devant la loi et a droit sans distinction à la même protection de la loi. Le ministre et I'API ont nié le traitement égal de M. Jones devant la loi en refusant de l'aviser des arrêtés pris contre lui et de lui en donner les motifs par écrit. Ils ont en


7 Les Déclarations universelles des droits de l’homme adopté par 1'assemblée générale des Nations Unies en décembre 1948.
"Droits de l’homme. Une compilation des instruments internationaux (1er Vol 1ère Partie) de I'ONU New York et Genève, 1994, xii.


outre nié sa protection en ne lui laissant pas le temps d'exercer son droit statutaire pour interjeter appel au Tribunal.


10ème Constat:

Le ministre de I'Intérieur et l'API n’ont pas observé les obligations internationales de Vanuatu, ils ont violé les droits de Marc-Neil Jones conformément à l’article 8.


6.10 Selon l'article 8, tout le monde a le droit à une réparation effective par les tribunaux nationaux compétents pour des actes de violation de ses droits fondamentaux prévus par la Constitution ou la loi. En niant son droit de faire appel contre les arrêtés de détention et d'expulsion, le ministre et l'API ont violé les droits humains fondamentaux de M. Jones conformément à l'article 8.


11ème Constat:

Le ministre de I'Intérieur et l'API n’ont pas observé les obligations internationales de Vanuatu, ils ont violé les droits humains de Marc-Neil Jones prévus a l'article 9.


6.11 L'un des principes fondamentaux des droits de l'homme est repris dans l'article 9, nul ne doit faire l'objet d'une arrestation, d’une détention ou d'un exile arbitraires. On pourrait débattre le fait que le ministre et l'API ont de façon arbitraire arrêté, déplacé et expulsé rapidement M. Jones bien qu'ils avaient d'autres options. S'ils estimaient vraiment que M. Jones représentait une menace pour la sécurité du pays, ils auraient pu le détenir en prison et suivre les procédures prévues par la loi.


12ème Constat:

Le ministre de I'Intérieur et l'API n’ont pas observé les obligations internationales de Vanuatu, ils ont violé les droits humains de Marc-Neil Jones conformément à l'article 19.


6.12 Le droit à la liberté d'opinion et d'expression est fondamental dans un pays démocratique. Selon l’article 19, toute personne a droit à la liberté d'opinion et d'expression dont la liberté d'avoir des opinions sans porter atteinte et de rechercher, recevoir et partager des informations et idées à travers les medias sans distinction de frontières. M. Jones est directeur d'un journal qui publie des articles critiques sur la politique du gouvernement. Le Premier ministre et d'autres ont annoncé publiquement qu'il devait être expulsé à cause de ses articles partiaux. Les droits de M. Jones d'avoir la liberté d'opinion et d'expression à travers Vanuatu Trading Post n’ont pas été respectés par le Premier ministre et ses complices, le ministre de I'Intérieur et l'API.


7. RECOMMANDATIONS


7.1 Le ministre de I'Intérieur doit connaître ses compétences et pouvoirs selon le R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'Immigration, et ne pas signer un arrêté d'expulsion clairement illégal.


7.2 Le ministre de l'Intérieur doit consulter I'Attorney général, conseiller juridique en chef du gouvernement avant de signer un arrêté d'expulsion.


7.3 L'Attorney général ou son délégué ne doit pas s'abaisser face aux pressions politiques et rédiger des arrêtés d'expulsion à la demande des politiciens.


7.4 L'API doit tenir compte de la loi qui le régit pour s'assurer que tout arrêté d'expulsion est légal, tenir compte du temps de l'avis et de l'appel.


7.5 L'article 3 du R.C. No. 18 de 1971 relatif à l'immigration (CAP 66) doit être modifié pour préciser que I'API a pour fonction d'appliquer les lois relatives à l'immigration sans se soumettre à l'autorité de quiconque.


7.6 Le Premier ministre et le ministre de I'Intérieur doivent se familiariser entièrement avec les instruments internationaux que signe Vanuatu, en particulier ceux relatifs aux droits de l'homme afin d'éviter à 1'avenir tout embarras au gouvernement et aux citoyens de Vanuatu. Cela peut se faire sous forme de brochure contenant la liste de tous les instruments ratifiés par le Parlement de la République de Vanuatu.


Fait le 31 octobre 2001


HANNINGTON G ALATOA
MÉDIATEUR DE LA RÉPUBLTQUE DE VANUATU


8.
ANNEXE
A
Lettre du Premier ministre au ministre de I'Intérieur
B
Arrêté d'expulsion
C
Arrêté de détention
D
Lettre de John Malcolm au ministre de l'Intérieur
E
Ordre intérimaire ex parte
F
Avis à témoigner, le ministre de l'Intérieur
G
Avis à témoigner, M. Lesley Garae
H
Lettre de l'Attorney général au médiateur
I
Lettre du médiateur à l'Attorney général
J
Déclaration de l'avocat John Malcolm

Lettre du Haut-commissaire britannique, Michael Hill
L
Lettre du ministre de l'Intérieur

Communiqué de Presse du Commandant de Police, Peter Bong
N
Déclaration du Capitaine Bongran Kalshem
O
Le bureau du Premier ministre, Communiqué de Presse
P
Réponse du Premier ministre
Q
Réponse du Commandant Bong
R
Réponse du Haut-commissaire britannique
S
Accord final de l'arrangement entre le gouvernement et Marc-Neil

Jones
T
Ordre d'accord de la Cour Suprême
U
Loi pertinente


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