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Rapports du M�diateur du Vanuatu |
RÉPUBLIQUE DU VANUATU
BUREAU DU MÉDIATEUR
RAPPORT PUBLIC SUR LE RETARD INJUSTIFIÉ PRIS PAR LA POLICE POUR ENQUÊTER SUR LA PLAINTE DE MARGUERITE CHANEL
24 novembre 2005
0504/2005/08
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RÉSUMÉ
Le présent rapport est publié sur une affaire qui a fait l’objet d’un reproche porté contre les forces de l’ordre pour manquement et retard d’enquête sur une plainte qui leur a été déposée par Mme Marguerite Chanel.
Il révèle également un résultat du système d’enquête policière où la Police tend à rechigner d’agir sur des petites plaintes et en particulier lorsque la plaignante est une femme ayant un handicap mental.
Mme Marguerite Chanel, très connue à Port-Vila, a rapporté à la Police qu’une personne est entrée par effraction chez elle et a volé de l’argent durant la célébration des fêtes de l’indépendance du 28 juillet 2000. La police n’a mené aucune enquête bien que la plainte soit déposée le même jour.
L’enquête du Médiateur montre que la Police a agi de façon injuste quant au traitement de la plainte de Mme Chanel, que la raison de ne pas s’occuper de cette plainte n’est pas justifiée et que cela est contraire au devoir de la Police qui est de garantir la sécurité et de protéger la vie de citoyens.
Le Médiateur recommande à la Police d’agir suite à toute plainte sans discrimination fondée sur la race, le lieu d’origine, la croyance religieuse, l’opinion politique, la langue ou le sexe. L’handicap physique ou mental d’un plaignant ne doit pas servir d’excuse pour mettre en veilleuse le traitement d’une plainte. Il est également recommandé à la police d’informer Mme Chanel des résultats de l’enquête dans cette affaire particulière.
Le Médiateur recommande également aux supérieurs d’assurer une supervision efficace afin d’obtenir rapidement des résultats des enquêtes.
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TABLE DES MATIÈRES
RÉSUMÉ.................................................................................. | 2 | |
1 | COMPETENCE ........................................................................................... | 4 |
2 | OBJET, PORTEE DE L’ENQUETE ET METHODES ADOPTEES ........................................................................................... | 4 |
3 | LOIS PERTINENTES..................................................................... | 4 |
4 | EXPOSE DES FAITS.................................................................................... | 4 |
5 | REPONSES DES PERSONNES FAISANT L’OBJET DES PLAINTES.................................................................................................. | 6 |
6 | CONSTATS.............................................................................. | 7 |
7 | RECOMMANDATIONS ............................................................ | 8 |
8 | LISTE DES ANNEXES............................................................................... | 9 |
1. COMPÉTENCE
1.1 La Constitution et la Loi relative à la fonction de médiateur me permettent d’examiner la conduite du gouvernement, des organismes connexes et des dirigeants. Cela couvre le service de la Police ainsi que la Police judiciaire en particulier au Quartier général de la Police à Port-Vila. (Dernière phrase à traduire car elle a été oubliée)
2. OBJET, PORTÉE DE L’ENQUÊTE ET MÉTHODES ADOPTÉES
2.1 Nous avons mené cette enquête en vue d’établir les faits se rapportant au présumé retard non justifié et négligence de la part de la police pour enquêter sur la plainte de Mme Marguerite Chanel et déterminer si la conduite des agents de police chargés de ce dossier est correcte ou si le Règlement conjoint N°7 de 1980 relatif à la création d’un corps de police à Vanuatu contient un défaut.
2.3 Notre bureau recueille les renseignements et documents sur des demandes informelles, sommations, suite à des lettres, interviews et recherches.
3. LOIS, RÈGLEMENTS ET RÈGLES PERTINENTS
Les lois, règles et règlements pertinents qui s’appliquent à cette affaire sont reproduits à l’annexe A.
4. EXPOSÉ DES FAITS
4.1 Dans la soirée du 27 juillet 2000, Mme Marguerite, très connue pour son handicap mental, était en ville pour regarder les activités de la célébration de l’indépendance qui se sont poursuivis jusqu’à tôt le lendemain matin.
4.2 En rentrant chez vers 2h du matin du 28 juillet 2000, elle a remarqué sa porte ouverte. Une personne est entrée par effraction chez elle, a mis ses affaires en désordre et a volé toutes les économies qu’elle a réalisées en vendant des cacahouètes. Ce petit commerce lui sert de gagne-pain.
4.3 Le même jour, elle se rend vers 13h00 au poste de police pour déposer une plainte sur le vol. Trois agents de police à savoir l’agent Dicker Kalmer, l’agent Paul Pakoa et le sergent Willie Ben sont de service ce jour là. Lorsqu’elle les a abordé pour déposer sa plainte, les trois agents se mettent alors à se montrer du doigt pour savoir lequel d’entre eux devrait traiter sa plainte. Au lieu d’entendre et prendre sa déposition, les agents se mettent à plaisanter sur qui devrait aider la plaignante. À sa fin, ils n’ont pas pris sa plainte. En voyant cette scène, Mme Chanel, dégoûtée, a finalement quitté le poste de police.
4.4 Elle rapporte l’affaire à Mme Boulekone qui l’a accompagné au Bureau du Médiateur et a déposé une plainte. Après briefing sur le dossier, un enquêteur du Médiateur accompagne Mme Chanel au poste de police où ils sont reçus par l’agent des services généraux et par les trois agents de police susmentionnés.
4.5 Suite à l’intervention du bureau du Médiateur et de l’inspecteur supérieur, M. Seru Tapairagi, Mme Chanel est priée de déposer officiellement une plainte à la Police concernant l’affaire qui s’est produite ce jour là. cf. extrait de la déposition à l’annexe B.
Mme Chanel confirme que ce n’était pas la première fois que des agents de la police l’ont traitée de la sorte. Elle affirme avoir été, à plusieurs reprise, traitée de la sorte, auparavant.
L’affaire étant engagée avec la collaboration du Médiateur, il est nécessaire de la suivre étroitement avec la Police jusqu’à ce qu’elle soit résolue.
4.6 Le 5 septembre 2005, le Médiateur informe le Préfet de police du comportement des trois agents en question. Il a souligné clairement que malgré l’apparence physique de Mme Chanel, la Police doit la respecter et la traiter comme tout le monde comme l’exige la Constitution. Le Médiateur demande à l’ancien Préfet de police, M. Peter Bong, de l’informer de toute mesure immédiate de sa part concernant cette affaire.
4.7 En réponse à la demande du Médiateur, M. Holi Simon, Préfet de Police d’alors, affirme ne pas être en mesure de donner des réponses à cette affaire. Il suggère au bureau du Médiateur de s’adresser à M. Seru Taparangi pour suite à donner. Cependant, il affirme que le dossier est renvoyé à la Police judiciaire pour plus amples enquêtes. cf. annexe C.
4.8 Le 7 novembre 2000, le Médiateur demande à l’agent de police, Jack Joses de la Police judiciaire, de tenir notre Bureau au courant de l’évolution du dossier. Le caporal Joses répond que le dossier de Mme Chanel est classé comme « dossier inconnu ». Voir annexe D.
4.9 Après avoir étudié les commentaires de M. Joses, le Médiateur lui demande le 16 juillet 2001 de donner les raisons pour lesquelles le dossier est classé dossier inconnu et si la Police a essayé d’enquêter sur l’affaire.
4.10 Le 19 octobre 2001, le caporal Joses informe le Médiateur que la police n’a pas tout de suite enquêté sur l’affaire car elle était occupée avec la célébration des fêtes de l’indépendance. Il a ajouté que la police ne pouvait pas enquêter sur l’affaire faute de renseignements fournis par la plaignante et que la police ne pratique presque plus les méthodes d’interrogation des voisins et de prise d’empreintes digitales. Voir annexe E.
4.11 Le 22 décembre 2002, nous avons demandé au commandant George Namaka de la Police judiciaire de confirmer les renseignements fournis par l’agent de police, Joses. Voir annexe F.
4.12 Dans une lettre non datée au Médiateur, M. George Namaka précise que dans la procédure d’établissement d’un rapport, dans le cas d’un vol, l’agent de police chargé de l’enquête se rend sur le lieu du crime, prend des photos et des empreintes digitales ou tout matériel laissé par le suspect. L’agent de police doit également interroger les voisins quant à tout soupçon sur le vol. Le commandant ajoute que le dossier restera ouvert dans les cinq prochaines années jusqu’à obtention de plus amples informations en vue d’une nouvelle enquête.
5. RÉPONSES DES PERSONNES FAISANT L’OBJET DES PLAINTES
5.1 Avant d’ouvrir l’enquête, le médiateur a informé toutes les personnes faisant l’objet des plaintes et leur a donné le droit de répondre. Il leur a également envoyé un document de travail pour leur donner une autre chance de répondre et de résoudre, le cas échéant, cette affaire à ce stade. Aucune des personnes suivantes n’a répondu:
le Préfet de police, M. Robert Diniro
M. Seru Tapairangi
le ministre de la Police et des prisons, M. Joe Natuman
M. Paul Pakoa
M.Dick Kalmer
M. Noel Amkorie
le sergent Willie Ben
Seuls le caporal Jack Joses et le commandant George Namaka ont répondu:
Les deux messieurs ont tous les deux affirmé que la police, en particulier la police judiciaire, ne pouvait pas enquêter sur l’affaire car elle était engagée à une opération combinée avant et durant la célébration des fêtes de l’indépendance.
M. Joses a ajouté qu’il a reçu une déclaration quelques jours après la célébration des fêtes de l’indépendance qui, apparemment, ne pourrait pas faciliter l’avancement de l’enquête. Il a également affirmé qu’aucune discrimination n’a été exercée contre Mme Chanel du fait qu’aucune enquête n’a été menée sur sa plainte et qu’en plus, ce n’est pas la première fois que la police a manqué de se rendre sur le lieu du crime. Il a affirmé que le dossier est toujours ouvert en vue d’obtention de renseignements complémentaires qui pourraient aider encore plus la police dans son enquête sur la plainte. Cependant, il regrette qu’on lui reproche de ne pas traiter la plainte de Mme Chanel. Il a traité certaines de ses plaintes auparavant dont l’une est même portée devant le tribunal.
M. Namaka précise que c’était la première fois que toutes les sections des forces de l’ordre participaient à une opération à cause du manque de personnel dans la police. Il ajoute que le manque de transport, en particulier pour la police judiciaire, constitue l’un des facteurs qui contribue énormément aux retards des enquêtes. Il affirme que cette situation a duré pendant presque quatre ans. Donc, ils ne peuvent pas participer aux travaux sur le terrain tels qu’aller à la recherche des suspects en vue d’interrogation. Vu l’importance de la section au sein des forces de l’ordre, elle doit avoir un appui logistique nécessaire. Sans cela, cette section de la police serait incapable d’exercer ses fonctions de façon efficace et effective et ne pourrait ainsi répondre aux préoccupations des citoyens.
6. CONSTATS
6.1 | CONSTAT 1: | TRAITEMENT INJUSTE D’UNE CITOYENNE, MARGUERITE CHANEL, PAR LA POLICE AUX SERVICES GÉNÉRAUX |
Le Médiateur constate que les agents de police – le caporal Dicker Kalmer, le caporal Paul Pakoa et le sergent Willie Ben – ont traité de façon indigne Mme Chanel.
Les agents de police présents au poste de police ont tous refusé de prendre sa déposition.
Ils se sont moqués d’elle et l’ont traitée de façon indigne. Ces attitudes contraires au code professionnel montrent que les agents de police en question ont violé leurs devoirs professionnels tels que prescrits par la Loi et le règlement intérieur de la police.
6.2 | CONSTAT 2: | RAISON INFONDÉE DE NE PAS ENQUÊTER SUR LA PLAINTE DE Mme MARGUERITE CHANEL |
La raison de ne pas enquêter sur la plainte de Mme Chanel à cause de la célébration des fêtes de l’indépendance n’est qu’une excuse inacceptable. La police a différentes sections chargées de tâches différentes, donc la section chargée des affaires pénales aurait dû enquêter sur la plainte.
L’autre raison de ne pas enquêter sur la plainte est que les trois agents n’ont pas pris la peine de prendre sa déposition lorsqu’elle s’est présentée au poste de police pour la faire. Ils n’ont ni informé ni expliqué à la plaignante les raisons pour lesquelles ils ne peuvent pas l’aider. Par contre, ils se demandent lequel d’entre eux devrait prendre sa plainte. En voyant cette scène, Mme Chanel, humiliée par les actes des trois agents, quitte le poste de police.
6.3 | CONSTAT 3: | MANQUEMENT DE LA PART DE L’AGENT DE LA POLICE JUDICIAIRE D’ENQUÊTER SUR L’AFFAIRE |
Il incombe à l’agent de police chargé du dossier d’y donner suite comme l’exige la Loi.
Le fait de manquer de se rendre sur le lieu du crime, d’interroger les voisins, de prendre les empreintes digitales démontre clairement une omission de la part de la police et constitue une infraction au devoir de la Police, au Règlement conjoint N°7 de 1980 relatif à la création d’un corps de police à Vanuatu et au règlement intérieur de la Police.
Le manque de sérieux de la part des agents de police discrédite la Police judiciaire et les forces de l’ordre.
En plus, la police a ignoré les droits de Mme Chanel quant aux “garanties contre la violation du domicile et des autres biens et contre l’expropriation injuste du patrimoine’’. Ce qui précède est un droit fondamental accordé par l’article 5.1)j) de la Constitution.
7. RECOMMANDATIONS
Le Médiateur présente les recommandations suivantes en tenant compte des constats susmentionnés pour éviter la répétition de tels actes à l’avenir.
Recommandation 1: | Le Médiateur recommande à la Police de traiter les plaintes reçues sans aucune forme de discrimination. |
Mme Chanel est une handicapée. Son apparition au poste de police montre qu’elle a besoin d’aide. Le fait de se demander lequel d’entre eux devrait l’aider et prendre sa plainte au moment où elle a besoin d’aide est discriminatoire et déraisonnable.
Recommandation 2: | Le Médiateur recommande à la Police de terminer l’enquête sur cette affaire et informer par écrit
Mme Chanel des résultats. |
Recommandation 3: | Le Médiateur recommande au préfet de prendre des mesures disciplinaires contre les trois agents de police conformément
aux dispositions du Règlement conjoint N°7 de 1980 relatif à la création d’un corps de police à
Vanuatu et du règlement intérieur de la Police |
Les agents de police ont pour devoir de toujours aider quiconque a besoin d’aide. L’attitude à l’égard Mme Chanel ne démontre même pas la confiance qu’a le public aux forces de l’ordre. Leurs actes déshonorent les forces de l’ordre de Vanuatu.
Recommandation 4: | Le Médiateur recommande à l’agent chargé de la Police judiciaire et au supérieur immédiat
de l’agent chargé du dossier d’avertir les agents de police intéressés contre de toute attitude
qui discrédite les forces de l’ordre. |
FAIT le 24 novembre 2005.
LE MÉDIATEUR DE LA RÉPUBLIQUE DE VANUATU
M. Peter K. TAURAKOTO
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LOIS, RÈGLEMENTS ET RÈGLES PERTINENTS
CONSTITUTION DE LA RÉPUBLIQUE DE VANUATU
DROITS ET DEVOIRS FONDAMENTAUX
Article 5
La République de Vanuatu reconnaît que – sous réserve des restrictions que la loi peut imposer aux non citoyens et dans le respect des droits de liberté d’autrui et de l’intérêt public légitime en matière de défense, de sécurité, d’ordre public, de bien-être et de santé – sont accordés à toute personne, quels que soient sa race, son lieu, ses croyances religieuses ou traditionnelles, ses opinions politiques, sa langue ou son sexe - tout en tenant compte du respect des droits et libertés des autres et l’intérêt public concernant la défense, la sécurité, l’ordre public et la santé – les droits fondamentaux et les libertés individuelles suivants:
la vie
la sécurité de la personne
e) la protection contre les traitements inhumains et les travaux forcés
k) le traitement égal devant la loi ou l’action administrative
R. C. N°7 de 1980 relatif à la création d’un corps de police à Vanuatu
Article 4.2
Le Corps de Police est employé partout à Vanuatu et dans ses eaux territoriales pour toute tâche relative à:
b) à la protection des personnes et des biens
Article 7
Tout membre investi en tous lieux du commandant et de la direction d’une unité particulière du Corps de police est désigné à cet effet par le Commandant. Tout membre ainsi nommé est considéré Commandant d’unité aux fins d’application du présent Règlement.
Un commandant d’unité est placé sous l’autorité du Commandant et exécute ses ordres pour toutes questions relatives à:
a) l’exercice des fonctions générales du Corps de police visées à l’article 4.
CODE DE PROCÉDURE PÉNAL
Article 23
Tout officier de Police doit, au mieux de ses capacités, intervenir dans l’intérêt de prévenir la perturbation de l’ordre public et toute infraction punissable par la Loi.
Règlement intérieur de la Police N0.P1 sur les infractions et les plaintes déclarées à la Police
Tout commandant d’un poste de police et service au sein des Forces de l’Ordre doit s’assurer que:
toute infraction et plainte est traitée à la date sa réception ; et
une supervision appropriée est exercée afin d’assurer que les nouvelles enquêtes sont exécutées sans retard.
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