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L'APPLICATION DU DROIT FRANçAIS AU VANUATU :
QUELQUES OBSERVATIONS SUR SON DÉCLIN ET SUR SON AVENIR
Anthony Angelo*
Pour celui qui s’intéresse au droit comparé ou qui se passionne pour histoire, le Vanuatu offre tout à la fois les richesses d’un Eldorado et les mêmes surprises que la boite de Pandore. Doté d’un système juridique qui permet ‘'usage aussi bien du droit anglais que français, ce pays est particulier à bien des égards.
Parmi les éléments qui en font son originalité c’est l’étude du rôle du droit français au Vanuatu qui retiendra notre attention. L’intérêt est double: sur le plan doctrinal tout d’abord, il faut indiquer quelles est le statut officiel aujourd’hui reconnu à la loi française par la Constitution du Vanuatu et sur le plan pratique ensuite, il faut préciser la place qui lui est encore dévolue dans le droit positif.
Pour mieux sérier le sujet, deux remarques préliminaires s’imposent: En premier lieu, la documentation sur le sujet qui nous intéresse, est bien mince et pour le moins éparse[1]. En effet, les seuls éléments de références les plus aisément accessibles ou commentés demeurent les décisions de la Cour Suprême ou de la Cour d’Appel et plus particulièrement celle rendues sous la présidence du Chief Justice actuel.
Ensuite la simple lecture de ces décisions, révèle d’emblée, la place et l’influence minimes faite au droit français et on en retire un premier sentiment de déclin aussi rapide qu’inexorable. Ceci conduit tout naturellement à s’interroger sur la réelle portée de certaines provisions de la constitution et d’une manière plus générale à se demander si l’existence, même réduite, du droit français au Vanuatu, a encore sa raison d’être.
La première partie des développement qui suivront, s’intéressera à la situation avant l’indépendance, puis dans une seconde partie seront considérés les principes dégagés par la Constitution ainsi que leur mise en oeuvre pratique, pour dans une troisième partie, tenter de proposer quelques solutions tendant au maintien l’application du droit français au Vanuatu.
A. La Convention de Londres.
En son temps, comme l’a fait remarquer un auteur[2], la Convention de Londres du 20 Octobre 1906[3] a été présentée comme le résultat des efforts de deux grandes nations qui sur la base des bonnes relations existant entre elles, ont su saisir l’occasion qui leur était offerte pour démontrer leur bonne foi dans la recherche d’une solution à une situation difficile. Il apparaissait que la solution obtenue ne pouvait, dans les circonstances actuelles, qu’être favorable à ces deux nations et plus particulièrement pour la France. à qui elle offrait d’importantes possibilités pour développer ses intérêts et pour augmenter son influence. Les débats parlementaires anglais, de l’époque, confirment cette même analyse (quelque peu désabusée) des événements, les politiques anglais craignant que par le truchement de la Convention, la France n’en vienne à totalement dominer le Condominium des Nouvelles Hébrides[4].
Encore aujourd’hui, la convention de 1906, conserve son importance non seulement pour comprendre l’évolution constitutionnelle de l’état du Vanuatu mais aussi parce qu’elle demeure l’élément majeur d’appréciation du droit positif contemporain applicable au Vanuatu, et plus particulièrement du rôle qu’y joue le droit français.
B. Le Protocole de 1914.
La Convention de 1906 a été modifiée par le Protocole du 6 Août 1914, ce dernier n’ayant été ratifié que le 18 Mars 1922[5].
Le principal objectif du Protocole était de mettre en place une organisation juridictionnelle permettant l’administration conjointe par la France et le Royaume Uni, du territoire des Nouvelles-Hébrides.
Les dispositions de cet accord apparaissent comme des structures réduites à leur strict minimum à seule fin de satisfaire la principale préoccupation de fournir un corps de règles juridiques applicables aux ressortissants des pays signataires du Protocole.
Ainsi, l’article 1 précise que les citoyens français et britanniques, se voient reconnaître[6].
« les mêmes droits de résidence de protection, de faire du commerce, chaque pays conservant sa souveraineté sur ses ressortissants et sur les personnes morales légalement constituées dans ces pays »
Rédigées en français et en anglais, les versions anglaise et française du Protocole, présentent toutefois quelques différences notamment quant à la portée de l’article 1er. En effet, dans sa rédaction en langue anglaise, le texte a vocation à s’appliquer à toutes personnes régies par le droit anglais à quelque titre que ce soit, alors que dans sa version française, le droit français ne doit trouver application pour ses ressortissants qu’en raison des droits de souveraineté reconnus à la France sur les Nouvelles Hébrides.
Dans son ensemble le droit applicable à la population autochtone était largement laissé à sa seule appréciation sur le fondement de leurs coutumes et traditions, à l’exception des décisions prises conjointement par les deux puissances tutélaires qui avaient vocation à être applicables à tous les habitants de l’archipel, « pour l’entretien et le bon gouvernement du groupe d’îles »[7]. Il s’agissait de l’ensemble des règles d’ordre public et d’administration générale.
Les règles de droit privé relatives au droit des obligations et plus généralement au droit privé, relevaient quant à elles du domaine de la coutume pour les autochtones ou de la loi anglaise ou française selon la nationalité des parties en cause.
Pour les personnes qui n’entraient dans aucun des trois groupes précédemment cités (ni de nationalité française ou britannique ou autochtones), obligation leur était faite, d’opter soit pour le régime de droit français ou anglais. Ce faisant l’article premier du Protocole, leur conférait les mêmes droits et prérogatives que ceux accordés à tous sujets britanniques ou citoyens français.
En tant que de besoin, les autres dispositions du Protocole organisaient les règles de conflit de lois devant s’appliquer chaque fois que deux régimes juridiques différents pouvaient trouver une application concurrente.
A cela s’ajoutait, la règle posée par les dispositions de l’article 20 qui attribuait une compétence de principe au tribunal (soit français ou britannique) du défendeur. Dès lors, celui-ci bénéficiait d’un indéniable avantage tant sur le plan procédural que sur celui des règles de fond applicables. Ainsi lorsqu’un sujet britannique intentait une action en justice à l’encontre d’un citoyen français, il ne pouvait le faire que devant les juridictions françaises uniquement et ce conformément aux lois françaises applicables. A l’inverse le citoyen français demandeur à l’action à l’encontre d'un sujet britannique, devait porter l’affaire devant une juridiction britannique, les règles de forme et de fond suivant la common law et les règlements pris par l’administration britannique.
Les dispositions de l’article 10 du Protocole prévoyaient la mise en place d’une Cour Mixte (Joint Court ) composée d’un juge français, un juge anglais et d’un troisième magistrat nommé par le Roi d’Espagne.
Son champs de compétence était a priori limité, aux seuls procès criminels et civils mettant en cause des autochtones, toutefois elle connaissait aussi des difficultés liées à la saisine concurrente des juridictions française ou anglaise (ou de leur refus de se déclarer compétentes) et renvoyait l’affaire devant une seule juridiction, la cour pouvant même sur demande conjointe du demandeur et du défendeur se transformer en juridiction de droit commun et connaître du fond du litige.
Hormis ces cas, la cour remplissait aussi les fonctions de cour d’appel statuant sur les décisions rendues par les tribunaux de première instance (District Court of First Instance ) et par les juridictions coutumières.
Sur le plan procédural, la Cour Mixte n’était nullement tenue de suivre les règles spécifiques que la convention imposait aux autres juridictions. En effet l’article 13 du Protocole lui permettait de choisir le droit applicable dans l’ensemble des règles alors en vigueur aux Nouvelles Hébrides ou le cas échéant de simplement avoir recours aux « principes généraux du droit et d’équité »[8].
C. La situation entre 1914 et la proclamation de l’Indépendance.
Dans la pratique, cette organisation conduisait à distinguer trois groupes de personnes: les français et toutes personnes qui avaient choisi l’application du droit français, les ressortissants britanniques et toutes personnes qui avaient choisi l’application du droit anglais, et enfin les Ni-Vanuatu ( les autochtones).
A cela il convenait d’ajouter quatre différents corps de lois: les règlements pris conjointement par les autorités anglaises et françaises applicables sur l’ensemble du territoire du Vanuatu, les coutumes indigènes qui s’appliquaient à la population autochtone des îles, la loi française applicable aux citoyens français et à ceux ayant opté pour la loi française, et la loi anglaise applicable aux sujets britanniques et à ceux ayant opté pour la loi anglaise.
La référence à loi française impliquait l’application possible des cinq codes français alors en vigueur aux Nouvelles Hébrides, à savoir, le Code Civil, le Code de Commerce, le Code Pénal, et le Code de Procédure Civile et enfin le Code de Procédure Criminelle.
La promulgation des textes légaux français applicables aux Nouvelles Hébrides se faisait par le Journal Officiel de Nouvelle Calédonie[9], de telle sorte que seuls les lois et décrets régulièrement promulgués formaient le droit français applicable. Partant, tous les modifications législatives apportées aux codes français mais non promulguées en Nouvelle Calédonie n’étaient, a fortiori pas applicables aux Nouvelles Hébrides. Aux cinq codes, il convenait de rajouter l’ensemble des textes spécifiques pris pour la Nouvelle Calédonie et les Nouvelles Hébrides. D’un point de vue strictement technique, ces textes étaient indépendants les uns des autres, mais demeuraient intimement liés dès lors que leur promulgation dépendait du seul Gouverneur en Calédonie. De plus, il n’était pas rare qu’aucune disposition spécifique n’ait été prise pour la promulgation d’un texte au Nouvelles Hébrides ou que des ambiguïtés accompagnent les modifications des textes déjà en vigueur et dans ces conditions les tribunaux considéraient que la loi applicable aux Nouvelles Hébrides suivait le sort de celle alors en vigueur en Nouvelle Calédonie.
Pour les ressortissants britanniques, le droit applicable regroupait non seulement des règles d’équité et de la common law, mais aussi toutes les dispositions de l’ordonnance de 1973 (New Hebrides Order 1973 ) modifiée en 1976 qui dans la mesure où les circonstances le permettaient, impartissait l’usage devant la High Court statuant en matière civile et criminelle, des textes en vigueur en Angleterre au 1er Janvier 1976.[10]
II. LA CONSTITUTION[11].
C’est ce système pluraliste dont allait hériter l’état du Vanuatu au moment de son accession à l’indépendance en Juillet 1980.
Toutefois, et c’est toujours le sentiment actuel de la population, rejoignant en cela l’opinion exprimée à la fois aussi bien par des avocats français qu’anglais, ou encore par les magistrats en poste au Vanuatu, le système juridique était et reste fermement ancré dans la common law, la loi applicable ayant été presque totalement anglicisée.
Cette analyse est accentué par la structure même de la Constitution du Vanuatu qui organisée sur le modèle dit de « Westminster », en reprend à l’identique non seulement le style, mais aussi les méthodes d’interprétation de la règle de droit qui y sont classiquement attachées[12]. S’ajoute à cela que depuis 1996, à l’exception d’un seul d’entre eux dans chaque profession concernée, non seulement tous les avocats mais encore tous les magistrats[13] en fonctions au Vanuatu sont des juristes formés par et pour la common law.
Tout ceci concoure à créer une inclination naturelle au recours des modes de pensée et d’analyse en vigueur dans la common law chaque fois notamment qu’il s’agira d’apporter des solutions à des problèmes touchant au droit administratif ou constitutionnel.
Cette tendance est encore accentuée, voire encouragée, par l’absence totale dans la constitution d’une disposition particulière qui pourrait assurer le plein respect de l’influence culturelle française.
Ainsi, la promulgation après l’indépendance du Vanuatu, des textes pris, entre autres, en matière pénale, de divorce, en droit commercial ou encore intéressant le droit du travail, ont tous été pensés, conçus et rédigés conforment aux règles qui régissent ces même matières dans la common law. Ce sont donc des pans entiers du droit positif qui sont contrôlés par la common law de telle sorte qu’en pratique, il n’y a pas d’autre alternative que de l’appliquer[14].
A. Les principes.
Le principe posé par l’article 93 (2) de la Constitution est simple dans sa formulation:
« sauf dispositions contraires votées par le parlement, les textes de loi britannique et français en vigueur avant le jour de l’accession à l’indépendance continueront à être applicables dans la mesure où ils ne seront pas expressément révoqués ou incompatibles avec le statut d’indépendance des Nouvelles Hébrides et ils devront autant que faire se peut prendre en considération les règles coutumières ».
La mise en pratique de cette disposition ne va toutefois sans susciter quelques interrogations qui sont à leur tour sources d’incertitudes.
En premier lieu, quel est le sort des textes de lois qui ont été pris conjointement par les français et les britanniques avant l’indépendance? Pour contourner cette difficulté, il a fallu, sous couvert de nouvelles lois du Vanuatu les promulguer à nouveau et les rassembler dans un recueil spécial le Revised Laws of Vanuatu 1988.
La seconde interrogation porte sur le fait que le Protocole de 1914 a été automatiquement révoqué en 1980, dès l’entrée en vigueur de la Constitution. Ceci posé, bien que les devenir des lois britanniques et françaises ait été réglé par l’article 93, rien dans le nouveau texte, à l’inverse du Protocole de 1914, ne prévoit leur modus operandi ? Aucune disposition ne précise si elles trouveront application à raison de la nationalité des parties concernées[15] ou si la faculté d’opter pour l’un ou l’autre des systèmes juridiques (français ou britannique) reste toujours en vigueur.
La principale conséquence de ce flou juridique fait que les lois britanniques et françaises en vigueur lors de l’indépendance[16] continuent, sauf dispositions législatives les révoquant expressément[17] ou implicitement à raison de leur caractère manifestement incompatible avec le droit nouveau, à produire effet et peuvent s’appliquer à toutes personnes et à toutes situations légales au Vanuatu.
Il convient aussi de noter que la signification de la version française de l’article 93 de la Constitution diffère de la version anglaise. Dans la partie essentielle de l’article 93 (2), la version française indique que les lois continueront à être appliquées sous réserve qu’elles n’aient pas été révoquées expressément et qu’elles ne soient pas incompatibles non seulement avec le statut d’indépendance des Nouvelles Hébrides mais aussi avec la coutume. Ainsi présentée, cette approche semble conférer à la coutume un rang prééminent sur lois françaises et anglaises. La version anglaise quant à elle, ne requiert seulement la prise en compte « de la coutume que chaque fois que cela s’avère possible ».
Le malaise est encore accentuée par la rédaction de l’article 93 (3). Là où le texte anglais prévoit que « les lois coutumières continuent de produire tous leurs effets au sein de la République », la version française quant à elle, indique que ces mêmes règles coutumières « continueront à jouer leur rôle dans le système juridique de la République » de telle que si le texte anglais reconnaît une véritable place faite à la coutume, le texte français demeure beaucoup plus réservé sur ce point.
2 L’article 45 - règle d’équité[18].
La Constitution ne précise pas comment en pratique, dans une situation donnée, les lois anglaises ou françaises doivent être appliquées.
Si l’article 45 fournit quelques indications dont l’application semble réservée à certaines situations complexes, il n’y a cependant pas d’explication véritable sur les modalités de règlement des difficultés inhérentes à la mise en oeuvre des dispositions de l’article 93. Dans sa version anglaise, l’article 45 précise qu’en l’absence de règle de droit applicable à une situation particulière, les tribunaux ne pourront se prononcer qu’en équité tout en respectant « autant que faire se peut » la coutume. Dans le texte français il est cependant prévu que confrontés à pareille difficulté, les tribunaux doivent se prononcer « en équité conformément à la coutume ».
Encore une fois, cette rédaction différente porte en germe des difficultés d’application. Toutefois l’étude des décisions de jurisprudence révèle que les tribunaux, privilégient toujours l’approche préconisée par le texte anglais. Ceci dit et malgré les difficultés conceptuelles attachées à la notion « d'équité » telle qu’elle est prévue dans la version française, cette dernière approche apparaît mieux adaptée pour de justifier l’intervention du juge confronté à l’absence ou au contenu peu clair d’une disposition légale particulière.
A n’en pas douter les tribunaux disposent d’une plus grande marge de manoeuvre lorsque l’action est fondée sur les dispositions de l’article 45 plutôt que sur l’article 93 et ce bien quand bien même ils demeurent en matière civile liés par les prétentions des parties (ce qui n’est pas sans introduire un nouvel élément d’incertitude pour les parties). En matière contractuelle toutefois, le recours au principe de l’autonomie des volontés, reconnu tant par le droit français qu’anglais, permet de considérer que les parties demeureront tenues par leur choix.
B Mise en oeuvre des principes posés par la Constitution.
1 Les situations de conflit entre la loi anglaise et la loi française.
Les remarques qui suivent ne concernent que les conditions permettant le recours au droit français tant par les plaideurs que par les tribunaux, et ce alors que la loi anglaise et française ont toutes deux vocation à s’appliquer.
Par principe, lorsque le recours à l’une de ces deux lois est possible, les dispositions de l’article 45 de la Constitution, ne doivent pas trouver application. La position de la Cour d’Appel et de la Cour Suprême de la République du Vanuatu est à cet égard parfaitement établie, reprenant en cela celle exprimée par deux des Chiefs Justices, Frederick Cooke et Charles Vaudin d’Imecourt[19] dans deux affaires de divorce.
Dans une première affaire, T v R[20], la demanderesse, sollicitait du tribunal le prononcé du divorce conformément à la loi française, le défendeur s’y opposant. Lorsqu’il s’est agit de se préciser quelle était la loi applicable à l'espèce, Cooke CJ, tout en prenant appui sur le Protocole qualifié par ses soins de « document hautement controversé »,[21] justifiait le recours à la loi française, en déclarant:
Il m’apparaît que toute la problématique est contenue dans le principe selon lequel les lois françaises et anglaises doivent trouver application, sauf dispositions légales contraires spécifiquement prises ou clairement implicites, faisant obligation aux tribunaux du Vanuatu d’appliquer impérativement de préférence l’une ou l’autre de ces lois aux ressortissants français et anglais ou à toute autre personne qui en venant au Vanuatu, pour une période plus ou moins longue, consent à se soumettre à l’une de ces deux lois. Quelle qu’en soit la durée, le seul fait pour une personne de séjourner au Vanuatu lui assure le bénéficie de la protection des tribunaux du Vanuatu et se trouve soumis à la législation en vigueur. Le principe de base étant que toute législation repose prima facie sur la notion de territorialité, de telle sorte que les lois de n’importe lequel des pays s’imposent non seulement à ses citoyens mais aussi aux autres personnes qui par leur présence sur un territoire déterminé se soumettent volontairement aux lois qui y sont en vigueur....le défendeur ayant vécu au Vanuatu pour plus de 13 années, qui s’y est définitivement établi, quelque soit sa nationalité, se trouve donc soumis aux lois de ce pays.....le mariage ayant été célébré conformément à la loi française, il reste tenu par cette même loi qui demeure en vigueur conformément aux dispositions de l’article 93 (2) de la Constitution.
Plus récemment devant par la Cour Suprême, statuant en qualité de Cour d’Appel, le Chief Justice Vaudin d’Imecourt, dans l’affaire Banga v Waiwo[22] , précisait non sans avoir rappelé les conditions dans lesquelles les droits français et anglais trouvaient encore application au Vanuatu[23]:
L’article 95 avait-il pour finalité de préserver le statu quo ou de permettre la création de nouvelles lois pour le Vanuatu? En d’autres termes était-il prévu que les lois anglaises et françaises devaient continuer à s’appliquer dans leurs formes avant l’indépendance uniquement aux ressortissants de ces deux pays ou à ceux qui les avaient choisies ou bien la Constitution instaurait-elle des lois nouvelles pour l’ensemble du Vanuatu? La réponse se trouve dans l’article 2 de la Constitution: « La constitution est la loi suprême du Vanuatu », les termes de l’article 95 (1) « ... comme si elles avaient été faites conformément à la Constitution » et de l’article 95 (2) « ....continueront à s’appliquer dans la mesure où elles ne sont pas expressément révoquées ou incompatibles avec le principe d’indépendance du Vanuatu ». Il est donc parfaitement clair que les lois promulguées sous les auspices de la Constitution forment les lois du Vanuatu qui doivent s’appliquer de la même manière à toutes personnes.
S’intéressant plus avant aux situations non prises en compte par les règles du droit positif du Vanuatu notamment celles qui régissent l’adoption et les droit des successions pour les Ni-Vanuatu, et se demandant s’il fallait dans ces domaines considérer qu’aucune loi ne s’appliquait à eux, il concluait[24]:
Je ne le pense pas. Ils peuvent choisir d’appliquer soit les lois du Vanuatu, soit les françaises ou anglaises. Si conflit de lois il doit y avoir, il appartient aux tribunaux de trouver une solution conformément au règles d’équité. Comme je l’ai précédemment indiqué s’il n’y a pas de possibilité pour les intéressés de choisir une loi applicable, je préconise alors que si une action a trouvé son origine dans le droit français tel qu’il était applicable au Vanuatu au moment de l’indépendance, elle doit trouver son aboutissement sur le seul fondement de cette loi, uniquement les mêmes règles et principes devant s’appliquer lorsque la loi anglaise est concernée. Le défendeur n’a d’autre alternative.
Pareil raisonnement s’inscrit dans le droit fil de l’arrêt Selb Pacific Ltd v Daniel Mouton[25] où dans une affaire de faillite le demandeur sollicitait l’application de la loi anglaise alors que le défendeur souhaitait quant à lui voir la loi française appliquée. Le Chief Justice devait faire valoir[26]:
Au moment de la signature de la Constitution du Vanuatu, la population tout comme les signataires de ce document, étaient parfaitement consciente des lacunes existantes dans les lois en vigueur. De manière certaine, les lois britanniques et françaises en vigueur avant l’indépendance n’auraient certainement pas été applicables aux Ni-Vanuatu et seules celles spécialement conçues à cet effet pouvaient leur être applicables. Dois-je en conclure qu’il entrait dans l’intention des signataires à la Constitution que cette étrange situation se pérennise après l’indépendance.....je n’ai aucun doute quant aux intentions du Parlement ou des signataires de la Constitution consistant à doter le Vanuatu d’un corps de loi ayant vocation de s’appliquer à tous au Vanuatu......il est certain qu’il existe des situations où les lois britanniques et françaises sont en conflit les unes par rapport aux autres.....cela pose le problème de savoir quelle loi appliquer durant une période déterminée. En l’espèce, dès lors que la procédure a été mise en oeuvre conformément au droit anglais, je considère que c’est donc celui-ci qui doit trouver application.
En dehors des situations purement théoriques (qui sont les seules à vraiment poser problèmes), d’une manière générale dans la pratique les situations de conflit entre lois britanniques et françaises demeurent extrêmement rares. De surcroît, si les faits impliquent la mise en cause de parties de nationalités différentes, la règle qui permet au demandeur de choisir la loi applicable, résout en grande partie la difficulté.
Il n’en ira cependant pas de même dans les affaires concernant des droits de propriété mobilière, lorsque il s’agira de choisir entre les dispositions de l’article 2279 du Code civil et celles de la règle nemo dat de la common law[27].
Cette situation peut se rencontrer lorsque les deux droits sont virtuellement applicables. Si tel est le cas, la véritable question est alors de savoir de quelle manière le choix devra s’opérer.
Tout d’abord il est évident que la référence au Protocole n’est plus possible dans la mesure ou il a été révoqué. Le système antérieur présentait l’avantage de conférer à la loi du défendeur préséance tant sur la forme que sur le fond.
Or en l’état du droit positif aujourd’hui en vigueur au Vanuatu, ce n’est certainement plus le cas, la situation étant pratiquement inverse. En effet c’est le droit du demandeur qui en règle générale semble prévaloir[28]. Il suffit pour s’en convaincre de prendre connaissance de la jurisprudence qui dans son ensemble confirme la place importante faite et le traitement privilégié accordé au droit du demandeur. En conséquence rien n’empêche que le défendeur dans un procès en responsabilité civile, s’il est poursuivi par deux victimes différentes, le soit sur le fondement de deux droits différents. Cependant on peut à supposer l’existence de faits ou de rapports entre les parties, qui chacun pris séparément seront susceptibles de justifier tout autant la mise en oeuvre du droit français, que celle du droit anglais, que les tribunaux n’appliqueront que la seule règle de droit visée par le demandeur, quand bien même sur le principe un autre droit aurait pu trouver application. Si la recherche de l’efficacité peut commander la solution, elle le fait en déniant la possibilité de l’utilisation même si cela demeure théorique, d’autres règles de droit qui ont vocation égale à apporter une solution au litige.
S’agissant là d’une règle de bonne justice, on pourrait penser qu’en pareilles circonstances le défendeur devrait pouvoir s’opposer au choix arbitraire du demandeur, ne serait ce que pour éviter des situations d’abus de droit.
D’un point de vue purement pratique il convient toutefois de remarquer que souvent quel que soit le droit appliqué, anglais ou français, il est rare que la solution obtenue soit différente[29]. En matière contractuelle par exemple, dans les deux systèmes, la compensation offerte à la victime prendra la forme de l’octroi de dommages et intérêts[30]. S’il est vrai que les règles de fond touchant aux conditions de validité du contrat ou encore à sa nullité, diffèrent sensiblement d’un droit à l’autre, il demeure que les solutions finalement retenues par les tribunaux sont pratiquement les mêmes. Dans le domaine général de la responsabilité civile, les points de convergences entre les principes de la common law en matière de négligence et les articles 1382 et 1383 du Code Civil français, sont indiscutables.
Ainsi il n’est pas sans intérêt de constater que les dernières décisions des tribunaux du Vanuatu[31], révèlent que la principale préoccupation des juridictions demeure surtout d’octroyer une juste indemnisation aux victimes et ce quand bien même cela devra se faire au détriment d’une véritable recherche d’un fondement légal de la responsabilité[32].
Sur ce principe plus pragmatique que juridique, chaque fois que le quantum de l’indemnisation finale apparaîtra comme sensiblement équivalent d’un système à l’autre, la remise en cause par le défendeur du choix opéré par le demandeur restera au stade de la simple hypothèse. Si l’on veut bien se souvenir que le droit visé par le demandeur est généralement le droit anglais qui est celui le mieux appréhendé par l’ensemble des plaideurs, on conçoit alors aisément que dans la pratique sa remise en cause aura d’autant moins de chance de survenir. A cela s’ajoute, qu’à ce jour, aucun des avocats du Vanuatu, n’a une formation suffisante pour pouvoir maîtriser le droit français.
Le principe de l’option ouverte au demandeur ne lui confère cependant pas une certitude au droit applicable. Le défendeur ne sera informé du fondement légal de l’action et du droit applicable, qu’une fois les poursuites engagées, et il s’agit là d’un net recul par rapport aux solutions du droit antérieur qui liait le droit applicable à l’option faites par les plaideurs ou à leur nationalité. Dans la mesure où l’on admet que la certitude du droit applicable est un des éléments fondamentaux permettant d’assurer une bonne justice, il est indéniable que dans ce domaine le système légal du Vanuatu a encore d’importants progrès à faire. Ne rien entreprendre équivaudrait à ajouter un élément d’incertitude aux solutions de droit et favorise une forme atténuée du recours au « forum shopping » que les droits modernes tendent à condamner.
En l’état du droit positif du Vanuatu, on ne peut pas exclure la possibilité de voir dans une même affaire et sur les mêmes faits, deux codemandeurs engager leurs actions sur deux règles de droit différentes.
En fait la véritable question est de savoir sur quel fondement juridique le choix ouvert au demandeur peut se justifier. Faut-il considérer qu’une présomption irréfragable de « bon choix » du droit applicable est attachée a priori à la requête introductive d’instance ou appartient-il au demandeur de convaincre les tribunaux du bien fondé de son choix? Dans cette dernière situation de quelle manière le demandeur prouvera-t-il le contenu voire la portée de la règle de droit dont il se prévaut? Les magistrats du Vanuatu ont-ils les connaissances nécessaires tant en droit français qu’anglais pour être à même de pleinement appréhender le droit dont le demandeur réclame application?
Dans certaines circonstances (par exemple, en matière de droit constitutionnel ou administratif ou encore pour les voies de recours possibles), l’application des règles de la common law peut se révéler un choix judicieux. En effet, chaque fois que le litige intéresse un de ces domaines, les fondements historiques et culturels ayant présidé à la mise en place de la Constitution, commandent le droit applicable, à savoir le droit anglais. Il en ira de même pour les recours ouverts aux demandeurs qui dans la common law apparaissent mieux adaptés que ceux offerts par le droit français lorsqu’ils sont basés sur l’équité. Par exemple, le recours à la notion de « trust », confère aux plaideurs des avantages immédiatement perceptibles et une facilité d’utilisation indéniable.
A l’inverse en matière délictuelle, tout porte à croire que le droit français sera d’un maniement plus aisé pour les parties aux procès.
Il y a cependant des situations où ni les règles du droit français ni celles du droit anglais n’apportent de solution satisfaisantes surtout si l’on considère les usages en pratique dans le reste du monde. Ainsi en matière contractuelle, la notion de « considération » en vigueur dans le droit anglais, au même titre que celle de « cause » qui prévaut en droit français, sont l’une comme l’autre considérées comme de sérieux obstacles pour la bonne compréhension de la nature et de la portée des engagements contractuels, à telle enseigne que la Convention des Nations Unies sur la Vente Internationale de Marchandises (dite Convention de Vienne) ne fait référence à aucune de ces deux notions. Un des moyens ouvert au Vanuatu pour remédier à la situation, serait de voter le plus rapidement possible un ensemble des lois nouvelles. Il ne devrait certes pas y avoir de difficultés majeures pour introduire dans leur droit interne des mesures compatibles avec les dispositions de la Convention de Vienne. Toutefois, les difficultés seront d’un tout autre ordre de grandeur lorsqu’il s’agira pour un état de taille modeste et récent sur l’échiquier mondial, de concevoir une reforme en profondeur du droit des contrats (d’autres domaines du droit sont évidement concernés), tendant à remettre en cause les règles françaises et anglaises encore en vigueur.
L’alternative pourrait consister dans la création prétorienne d’un système juridique qui intégrerait une démarche comparatiste et pluraliste plutôt que le recours aveugle et systématique aux seules règles de la common law.
En théorie rien ne pourrait s’opposer à pareil procédé sauf lorsque les tribunaux en présence d’une référence précise faite par le demandeur, au droit français ou anglais, se verraient contraint de l’appliquer[33]. Si tel devait être le cas, l’usage du droit français deviendrait alors plus fréquent. Ce mouvement devant toutefois s’accompagner par une formation adaptée du personnel judiciaire pour se familiariser avec les règles françaises. En matière civile, le minimum d’efficacité commande d’avoir, ne serait ce qu’un magistrat siégeant à la Cour d’Appel, qui soit spécialiste du droit français. En matière criminelle, l’urgence n’est pas la même, les principales lois pénales du Vanuatu ayant été, comme dans le droit français, toutes codifiées, et partant d’un accès plus aisé. En droit constitutionnel, la méthode comparatiste peut aussi présenter des avantages, bien que le texte de la Constitution rédigé dans deux langues différentes puisse conduire à des résultats divergeants. Le bénéfice de l’usage de cette méthode sera nettement plus marqué lorsqu’il s’agira d’interpréter une loi incomplète ou de pallier à son inexistence.
L’approche comparatiste nécessiterait aussi que les conditions d’accès au barreau du Vanuatu soient adaptées et imposent aux impétrants de faire la preuve de connaissances au moins égales en droit français et anglais dans les domaines des contrats, de la responsabilité civile, de la procédure civile ou encore des biens. L’analyse des décisions des tribunaux du Vanuatu confirme que le droit français n’a été utilisé non seulement lorsque le demandeur l’avait sollicité mais aussi parce que son conseil avait une formation suffisante pour en faire usage[34].
Certes la solution de facilité pour résoudre les problèmes liés à l’utilisation concurrente des deux droits français et anglais, consisterait de cesser purement et simplement de faire référence au droit français pour n’utiliser que le droit anglais uniquement. Cela pourrait se faire sans trop de difficultés lorsqu’on se souvient que le droit anglais est généralement celui qui est utilisé et que les magistrats tout comme les avocats y sont principalement formés. En droit commercial, administratif et constitutionnel, cette suprématie est déjà une réalité incontournable et ce quand bien même le demandeur avait souhaité voir appliquer la loi française. Se réfugiant souvent derrière le respect des fondements culturel du Vanuatu et de la perception quant à la population, toutes deux fortement façonnés de la tradition anglaise, les tribunaux privilégieront toujours le droit anglais.
Il reste que les dispositions de l’article 93 (2) de la Constitution militent pour une conclusion différente et il serait regrettable de ne en pas tirer pleinement avantage. En effet, non seulement une approche restrictive de la mise en oeuvre de l’article 93 (2) heurte la logique juridique et trahi l’esprit du texte, mais réduit aussi les perspectives de développements du droit au Vanuatu. Rien n’empêche en l’état des textes que seul le meilleur des différents systèmes juridiques soit retenu pour être intégré dans le droit positif du Vanuatu. La particularité du système juridique de ce pays ne doit pas être conçue en termes de désavantages, mais plutôt comme porteur de solutions nouvelles. A n’en pas douter, il s’agit là d’une opportunité unique qui ne doit pas être compromise par de simples contingences de confort intellectuel et de facilité dictées plus par les habitudes que la raison.
* Professeur de Droit à Victoria University of Wellington. L'auteur remercie le Chief Justice du Vanuatu et Me A. de Préville (familier de lR[1]application du droit français au Vanuatu), pour les précieux conseils et l’assistance qu’ils lui ont prodigués durant la préparation de cet article, en 1996.
1 Voir la bibliographie in fine.
[2] Polities, Le Condominium Franco-Anglais des Nouvelles-Hébrides (Pedone, Paris, 1908), p 7.
[3] L’article 1 de la Convention de Londres de 1906 avait pour origine l’Acte de Berlin relatif aux Samoa.
[4] Voir par exemple Parlementiary Debates (UK), 13 Février 1907, vol. 169.
[5] The New Hebrides Order in Council, 1922 (No. 17).
[6] Le recensement fait au début de la mise en place du régime de 1914 révélait qu’il y avait 401 citoyens français, 228 Britanniques et Australiens. Celui de 1989, dénombrait 139.986 Ni-Vanuatu, 510 Australien, 154 Néo Zélandais, 671 Français, 289 Britanniques, 115 Fidjiens, 598 d’autres nationalités, et 96 personnes qui ne se s’étaient pas prononcées.
[7] Article 7.
[8] Article 13 (2) (B). A comparer avec les dispositions de l’article 45 de la Constitution.
[9] Sur les règles gouvernant la publication des textes officiels en Nouvelle Calédonie, voir Y-L Sage, The Application of Legislation in the French Overseas Territories of the Pacific, in Essays on French Law in the Pacific, VUW LR Monograph 8 (1993) p. 25. J-Y Faberon, le Statut des Territoires d’Outre Mer, Les Petites Affiches, 9 août 1991 n° 95.
[10] Section 3 de la seconde ordonnance de 1976.
[11] Les langues officielles du Vanuatu sont le français, l’anglais, et le bislama (article 3 de la Constitution), chaque citoyen étant libre d’utiliser l’une de ces trois langues (article 62). C’est du reste sur cette question particulière que portait le premier rapport rédigé par l’Ombudsman du Vanuatu (Special Report on the Observance of Multi-lingualism-Septembre 1995, voir notamment p. 8 § 3.2). Le parlement est composé d’une seule chambre (article 15) et édicte seul ses règles de fonctionnement (article 19 du règlement intérieur). Le règlement intérieur de 1982 régit le fonctionnement du parlement. Il précise que le Speaker (le Président) le représente (article 10 du règlement intérieur) et que toutes décisions prises doivent être rédigées en anglais et en français. La cour Suprême du Vanuatu a rappelé qu’il appartient au seul Speaker de prononcer la suspension d’une des modalités de ce règlement et ses décisions sont à cet égard définitives (article 60 du règlement intérieur). Le Spécial Report on the Observance of Multi-lingualism a relevé que si le règlement intérieur du Parlement indique les modalités tendant à la formation des textes de lois, il demeure que les textes de lois en français et en bislama ne sont généralement inexistants.
[12] Lors de la mise en place de la Constitution les principes constitutionnels français ont été en partie pris en compte. Le résultat est surtout perceptible dans le fait que le Vanuatu est une république ayant à sa tête un Président et non pas un Gouverneur-Général.
[13] Un magistrat nouvellement nommé a certes une formation en droit français, mais aucune expérience pratique.
[14] Même si en matière de divorce ou de mariage d’autres textes de lois auraient pu trouver application en raison de la nationalité des parties en cause.
[15] En fait cela irait à l'encontre de l’article 5 de la Constitution relatif aux respects des droits fondamentaux, y compris celui de l’égalité des citoyens devant la loi.
[16] Sous réserve du respect des règles de l’article 93 de la Constitution.
[17] Par exemple les règles françaises et anglaises en droit pénal, sur le mariage et le divorce ont été supplantées par le nouveau droit du Vanuatu mis en place après l’indépendance.
[18] En anglais « substantial justice ». Le mot « équité » tel qu’il est utilisé dans le présent article est celui utilisé dans les textes du Vanuatu rédigés en langue française. Il ne doit pas être confondue avec la notion d’Equity qui correspond dans la tradition de la common law à l’ensemble des règles émanant de la Chancery Division. Ceci étant, dans le présent contexte, toute tentative d’opérer une distinction claire entre ces deux notions est une véritable gageure pour le juriste.
[19] La consultation et la compréhension des vues exprimées par ces Chiefs Justice sont facilitées par la lecture de l’ouvrage en 3 volumes Vanuatu Law Reports 1980-1994, éditées par John Ridgway.
[20] [1980-1988] 1Van LR 7.
[21] T v R p. 9.
[22] Appeal case No 1 de 1996.
[23] Banga v Waiwo pp. 5-7.
[24] [Page 9.][Voir supra n 18] La référence faite à la notion d’équité peut dans cette partie du raisonnement du magistrat apparaître erronée puisque ce n’est qu'à l’article 45 de la Constitution que cette notion est indiquée. Il semble cependant que c’est dans un contexte diffèrent que le Chief Justice, en a fait mention. Il a pu viser le rappel d’un principe général qui pèse sur les tribunaux ou encore voulu donner une nouvelle interprétation de l’article 45, à savoir que le recours possible à deux corps de règles différentes équivaut à pas de règle du tout.
[25] Civil case No 42 de 1994.
[26] Selb Pacific v Mouton pp. 1-2.
[27] Il a y certainement là une question qui relève de la notion d’ordre public car la réalité, la certitude de l’existence d’un titre et la sécurité des transaction sont autant d’éléments fondamentaux pour l’économie d’un pays. La véritable interrogation doit porter non pas sur le fait de savoir qui est le demandeur mais plutôt de savoir si les droits de propriété doivent être déterminés en raison de la nécessaire protection du titre ou de la transaction.
[28] Réserves faites pour certaines exceptions.
[29] Voir supra n 26.
[30] Les principes de base régissant la matière dans la common law ont été posés dans la décision Hadley v Baxendale qui fait référence aux articles 1149-1151 Code Civil.
[31] Leigh v. Soc. Civ. Intercontinental [1980-1988] 1 Van LR 76; Solzer v. Garae [1989-1994] 2 Van LR 528; Bastien v Michtoutchkine [1989-1994] 2 Van LR 540.
[32] A l’appui de cette thèse on peut aussi soutenir qu’en matière de responsabilité délictuelle, il n’est pas fondamentalement injuste de laisser le choix de la règle de droit applicable à la victime, les défendeurs devant s’adapter.
[33] Cette situation n’est pas sans présenter des similitudes avec le système en place à l’île Maurice et les autres pays qui ont connu une influence colonial de plusieurs pays différents.
[34] L’affaire Pentecost Pacific Ltd v Palene Hnaloane [1980-1988] 1 Van LR 134 (1984) fait figure d’exception lorsque il a été jugé pour débouter un demandeur que la nationalité du défendeur (française en l’occurrence) imposait que la solution soit rendue conformément à la loi française.
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